Taulard

taulardbadge1 On devrait les appeler Tocards, mais allez savoir pourquoi, ils ont préféré s’appeler Taulard.

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TAULARD – les Abords du lycée – LP – TOFU 74/3 (STREAM)

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Interview dans le numéro 2 de Maximum Cuvette

Salut Taulard. Question classique pour débuter une interview, mais pouvez-vous présenter brièvement votre groupe et nous raconter un peu comment votre projet musical a vu le jour. En me renseignant à droite et à gauche, j’ai cru comprendre que Taulard était un projet solo à la base…
Salut Maximum Cuvette ! On est quatre dans le groupe. Il y a Jérôme à la basse, Nico à la batterie, Josselin qui chante et Nico qui joue du synthé. On joue du synthépunk, sans guitare, avec un clavier pourri. Parfois, nos morceaux ressemblent plus à des chansons rock qu’à du synthépunk.
Au départ il y avait des chansons, et le groupe s’est formé pour pouvoir les jouer. Taulard n’a jamais existé comme projet solo. La plupart des chansons existaient avant que le groupe se forme, mais elles ont été écrites toujours dans l’espoir d’être jouées en groupe.
 
La première fois que je vous ai vu en concert, j’ai été surpris par deux choses, d’une part, par l’énergie que vous dégagez sur « scène », d’autre part, par la moyenne d’âge relativement jeune du groupe. On a déjà du vous faire ce genre de remarques des centaines de fois, mais pensez-vous que ces deux éléments soient d’une manière ou d’une autre liés ? L’âge représente-t-il, selon vous, une barrière dans une scène punk de plus en plus vieillissante ?
Nico et Jérôme : Non, écoute, malgré la différence d’âge, on ne se sent pas différenciés des autres.
Josselin : Je crois qu’on se pose pas toutes ces questions sur l’âge. Il se trouve que dans notre groupe, il y a deux ados, mais c’est pas ça qui nous rend plus énergiques ou dynamiques que d’autres groupes… en gros, énergie et jeunesse ne sont pas forcément liées et t’as qu’à aller voir Plaine Crasse en concert pour pouvoir t’en rendre compte. ou Needles.
En tout cas une chose est sûr, c’est qu’on aime bien bouger et danser (à part Nico synthé qui danse jamais).
 
Après avoir sortie une première démo K7 il y a deux ans, vous avez récemment sorti un EP. Pouvez-vous nous en parler un peu ? Pourquoi avoir choisi de tels supports ?  A l’époque du tout numérique, plus d’un.e pourrait, en effet, être surpris.e par de tels choix…
Jérôme : C’est vrai que ça apporte une certaine satisfaction de se dire que j’ai sorti mon premier vinyle au même âge que Bob Marley, mais en revanche au lycée on me demande plutôt si j’ai pas la  platine à vendre avec.
Nico : moi j’ai été content de sortir un vinyle parce que ça donne un rapport plus intime avec la musique gravée dessus par rapport aux supports plus modernes.
Josselin : je t’avoue que si tu m’avais dit que j’allais sortir un vinyle  7 ‘’ avec mon groupe il y a trois ans, j’aurais eu du mal à te croire. Maintenant ça me paraît moins surprenant. Les groupes autour de nous sortent pour la plupart des K7 et des vinyles.  On prend modèle sur les autres.  C’est sûr, sortir un vinyle prend plus de temps que sortir un CD, mas j’ai trouvé intéressant de m’occuper des différentes étapes (quoiqu’un peu stressant du au résultat qui m’a pas vraiment convaincu).
Au niveau du contenu, il y a quatre chansons sur cet EP, très différentes les unes des autres, tant au niveau de la structure des morceaux que dans le contenu des paroles, qui va des situations tendues dans la rue, au récit réel ou imaginé d’une année passée à Londres, en passant par la fuite d’un évadé qui va prendre fin en pleine montagne, et une lettre à mon frère jumeau.
 
D’ailleurs, en parlant de numérique, la plupart de vos morceaux sont en téléchargement libre sur internet. Est-ce quelque chose d’important pour vous ? Etes-vous contre toutes formes de propriétés musicales / culturelles et pratiquez-vous le téléchargement ?
Oui c’est important. On met nos morceaux à télécharger pour que le gens puissent décider s’ils veulent l’acheter ou non. On s’est assez fait avoir dans le passé en achetant des CD à 15€ qu’on écoute qu’une fois. Il y a aussi le côté pratique, tu télécharges les chansons, tu les as sur ton ordi et tu peux les écouter dans ton baladeur. On pratique tous le téléchargement. On écoute la plupart du temps que des MP3s. Et puis on n’est pas opposé à la propriété musicale, mais c’est pas comme ça qu’on a décidé de fonctionner avec le groupe.
 
Si l’on me demandait de décrire votre musique en quelques mots, je dirais qu’elle se situe à la croisée de la new-wave et du post-punk, mais avec une bonne dose de spleen et de mélancolie, ce qui vous rapprocherait ainsi de courants musicaux plus éloignés, comme le blues par exemple. Comment vous situez-vous par rapport à toutes ces étiquettes ? Quelles sont vos principales influences et sources d’inspirations dans le groupe ?
Josselin : Je crois pas qu’il y ait de mélancolie dans mes textes. Du regret oui, de la souffrance de s’être planté, aussi.
Jérôme et Nico : on cherche pas spécialement à se coller d’étiquette. On a un son plutôt atypique, sans guitare. Nous, on a un jeu qui ressemble parfois à du jazz ou du funk parce que c’est comme ça qu’on a appris à jouer.
Josselin : et puis y a toutes ces influences classiques, les enchainements d’accords, le baroque dans « dans mes tempes », on reprend Josquin Desprez et Janequin, des trucs que j’ai appris à la fac avec Nico synthé.
Perso, je décris maintenant notre musique comme synthépunk car depuis la K7, notre son a évolué : on joue plus vite et on a changé les rythmes de batterie. Postpunk je crois pas. Blues non plus, et  j’ai plus envie d’entendre New-Wave car je sais pas trop à quoi ça correspond et je le prend mal quand on nous compare aux Inconnus.
 
Vous avez choisi une sorte de petit totem comme logo pour le groupe. Qu’est-ce que ce totem représente, symbolise pour vous ? Possède-t-il une signification particulière ? Puis, autre question, pourquoi avoir choisi de vous appeler Taulard ? Parce que ça sonne un peu anarko-punk / crustouille comme nom de groupe, vous ne trouvez pas…
Josselin : Le totem ne symbolise pas grand chose. Il est apparu pour la première fois sur la pochette du CD démo. Les paroles sur l’insert ont aussi été découpées de façon à former des totems. C’est juste un objet qui me plait, au point de m’être inscrit il y a quelques années à un cours de sculpture sur bois à Villeurbanne pour pouvoir en sculpter un! et d’être allé à Seattle l’été dernier pour en voir des vrais. Donc ouais, aucune symbolique cachée, j’ai juste un intérêt esthétique pour l’objet.
Et Taulard c’est mon nom de famille en verlan. Un gars au collège m’appelait comme ça. C’est un élément marquant de mon adolescence, qui colle  bien avec les sujets abordés dans les chansons.
Nico synthé : Ouais c’est vrai que le nom du groupe peut prêter à confusion ; en concert, un mec nous a même une fois accusé d’être des usurpateurs, parce que visiblement aucun de nous quatre n’étions passés par la case prison dans notre existence… Et en même temps ça crée une surprise pour les gens qui nous voient pour la première fois, alors qu’ils s’attendent à découvrir des bons vieux Stoners ou un groupe de Crust comme tu le dis. Et si du coup  tu t’intéresses à l’histoire du groupe, tu es vite mis au parfum de la ‘Private Joke’, référence à l’adolescence de Jo.
 
J’ai l’impression que les textes (souvent sombres, toujours sincères) jouent un rôle tout aussi important que la musique dans le groupe. D’où vient cette attention toute particulière  qui leur est accordé ? Quel est votre rapport à l’écriture : était-ce un moyen d’exprimer ses vieux démons ou une manière de prendre du recul vis-à-vis de périodes difficiles de sa vie ? Je pense ici notamment aux textes de « 31/12/00 » et de « Se sortir d’un faux pas » qui sont des textes très personnels.
Josselin : Oui, les textes sont personnels. C’est des trucs qui me sont arrivés, des situations dans lesquelles je me suis trouvé. J’écris sur ça parce que je vois pas sur quoi je pourrais écrire d’autre. Les drames liés à ma famille et les différents états dans lesquels je me trouve sont les sujets qui m’inspirent. Par exemple, sur la chanson « Impasse » qui relate une année de galères, j’ai repris toutes les notes que j’écrivais à l’époque où je me sentais vraiment mal. Ça donnait « je regrette tous mes choix, j’ai perdu un mode de vie, je suis tourné vers le passé, je supporte pas mon quotidien ». J’ai rassemblé ce qui me semblait le plus pertinent et j’en ai fais une chanson. Les chansons de Taulard, c’est les premiers textes que j’ai écrits, j’avais jamais fait ça avant. Forcément, j’ai écrit en premier sur ce qui occupait mon esprit. Je suis prêt maintenant à écrire des chansons plus légères, quoi qu’il y en ait eu dès le départ. Je veux dire « dans mes tempes » parle du trac d’aller parler à  une meuf qui te plait et « ville portuaire » de bouger pendant l’été.
 
En ce qui concerne la démarche, vous semblez avoir choisi de fonctionner de la manière la plus indépendante possible. Est-ce important pour vous de faire le plus de choses possibles par vous-mêmes ou avec l’aide de vos amis et de vous passer des circuits musicaux traditionnels ? Que représente le do it yourself no-profit pour vous ? Et, d’une manière générale, quelle place la musique occupe-t-elle dans vos vies ?
Oui c’est important… en même temps, on a jamais réfléchi sur comment on pourrait fonctionner autrement… Quand on a débuté, on est passé par ce que tu peux appeler le circuit musical traditionnel de tout groupe grenoblois qui ne connaît personne en jouant à l’Art-ti-cho et au Dock. Pouah ! On est contents et reconnaissants d’avoir intégré la scène punk et son réseau et de ne plus avoir à jouer là-bas.
Josselin : On fait aussi les choses par nous-mêmes parce qu’on a les moyens financiers de le faire. Si j’avais pas pu avancer les sous pour sortir le EP, j’aurais sûrement contacté des gens. Mais la c’est ce que je répondais aux personnes qui voulaient nous aider financièrement, c’est que c’est pas nécessaire, l’argent on peut le sortir, par contre aide-nous à le distribuer en achetant des copies pour ta distro ! Taenia Solium ont été cool de nous aider. Tu fais parti d’un chouette crew.
La démarche do it yourself no profit, ça permet de minimiser les coûts, de se faire enregistrer par un ami dans la cave plutôt qu’ailleurs où ça sera cher, de faire des pochettes sérigraphiées sur du papier récupéré plutôt que de les faire faire par la boite de pressage, et ainsi de proposer ta  K7 ou ton EP à 3€.
Sinon, je dirais que la musique occupe une place importante dans nos vies.
Nico synthé : Je ne vais pas te raconter des balivernes, je ne connaissais pas bien le milieux DIY avant Taulard. Maintenant ça me semble juste incontournable de pouvoir se dire « T’as des bras, des jambes, des potes, et tu t’en fous du profit… De quoi t’as besoin d’autre pour jouer de la musique et organiser des concerts ! »
Quand à la place qu’occupe la musique pour moi ? Rien a changer depuis l’adolescence, j’écoute de la musique quand je suis très déprimé, très heureux ou très révolté, autrement dit au moins trois fois par jour…
 
Sinon avez-vous des projets pour la suite : faire des concerts / une tournée, enregistrer et sortir un nouveau disque ou que sais-je encore ? Puis, petite question classique, quels sont les disques que l’on retrouve en ce moment dans le baladeur ou la chaine hifi d’un membre de Taulard ?
On enregistre en juillet et ensuite on part jouer dans le sud ouest (Aveyron, Toulouse, Bordeaux), peut-être en Espagne. Ca va être trop bien..
Nico : en ce moment j’écoute beaucoup de post-rock comme Sigur Ros et de Stoner comme The Cosmic Deads (Joss : parce que c’est un stoner lui-même ah)
Jérôme : pour ma part je navigue dans ma période de musique mettant l’accent sur le texte donc rap français et américain surtout, comme le Saïan Supa Crew, la Moza, la scred-co, 2pac et tout le « old-school » u.s. et Hip-hop jazzy qui groove.
Nico synthé : Je prends ta question au pieds de la lettre. En consultant mon lecteur numérique, voilà les 4 albums qui arrivent en tête de lecture pour ce dernier mois : Godspeed You! Black Emperor-Slow Riot For New Zero Kanada- ; Xiu Xiu-Fabulous Muscles- ; Parenthetical Girls-Privilege*-  et Dalek-Abandoned Language-.
Josselin : J’écoute tout le temps Poliskitzo et l’album des Zounds « the curse of Zounds ».
 
Bon ben voilà, l’interview arrive son terme. Si jamais vous avez envie de laisser une petite adresse courriel ou postale à laquelle on puisse vous joindre, c’est le moment. A vous le mot de la fin.
yo, notre adresse mail c’est villeportuaire(at)gmail.com. Venez nous voir jouer cet été ! merci de ton intérêt et à plus !!